Le non-port du casque sur un chantier, un motif de licenciement ?

CA VERSAILLES, 18 septembre 2024, RG n° 22/02175 *

Par cet arrêt, la Cour d’appel de VERSAILLES est amenée à apprécier le bien-fondé d’un licenciement prononcé en raison du refus du port des équipements de protection individuelle.

Au-delà même de l’obligation de sécurité pesant sur l’employeur, on rappellera que le salarié lui-même est soumis à une telle obligation.

Selon l’article L. 4122-1 du code du travail, conformément aux instructions qui lui sont données par l’employeur, il incombe à chaque travailleur de prendre soin, en fonction de sa formation et selon ses possibilités, de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres personnes concernées par ses actes ou ses omissions au travail.

Les instructions de l’employeur précisent, en particulier lorsque la nature des risques le justifie, les conditions d’utilisation des équipements de travail, des moyens de protection, des substances et préparations dangereuses.

A titre d’illustration, le refus du port des EPI pour un chef magasinier justifie un licenciement pour faute grave (Cass. soc., 19 juin 2013, n° 12-14.246).

Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.

Au cas d’espèce, il était question d’un salarié qui a été engagé en qualité de technicien de maintenance à compter du 08 septembre 2003. Il a été licencié, le 26 août 2019, pour faute grave en raison d’un refus de se conformer aux règles de sécurité, et plus précisément, au port du casque sur un chantier.

Contestant ce licenciement, le salarié a donc saisi les juridictions prud’homales.

Après avoir rappelé les règles en matière de licenciement pour faute grave, la Cour d’appel de VERSAILLES note, en l’espèce, qu’il est reproché au salarié le défaut de port de casque de sécurité sur le chantier, ce qu’il ne conteste pas.

A ce titre, elle relève que le salarié ne portait pas son casque de sécurité lors d’une visite inopinée de la directrice de l’agence et du contre-maître sur le chantier. Sa supérieure hiérarchique a dû fortement insister pour qu’il le remette, le salarié ayant finalement déféré à la demande.

Cependant, il ne portait plus son casque lorsque sa supérieure hiérarchique est ensuite revenue, le salarié refusant catégoriquement de le porter, ce qui a conduit sa hiérarchie à lui demander de quitter le chantier.

Si l’employeur ne peut se prévaloir des consignes de sécurité rappelées dans le règlement intérieur, dont la date est postérieure à celle de la rupture, il n’en demeure pas moins que les dispositions du manuel de sécurité relatives aux EPI rappellent l’exigence de leur port impératif, dont le port du casque sur les chantiers.

L’employeur établit donc que le salarié avait connaissance des règles de sécurité à respecter et qu’un rappel à l’ordre lui a été fait sur le chantier, le salarié étant en outre coutumier du non-respect des consignes, comme cela résulte des nombreuses sanctions qui lui ont été notifiées pour des faits similaires.

En dépit de l’importante ancienneté du salarié et en raison de son refus, réitéré sans motif véritable, de porter sur le chantier son casque de sécurité et donc de la potentielle dangerosité du comportement adopté, la Cour juge le licenciement fondé sur une faute grave.

Cet arrêt met en lumière les obligations pesant sur chaque salarié et la possibilité pour l’employeur de prononcer un licenciement pour faute grave en raison du non-respect du port des EPI, en dépit d’une ancienneté de plus de 10 ans du salarié fautif.

Là encore, tout est affaire de circonstances.

Ainsi, dans un autre cas d’espèce, le licenciement a été jugé abusif pour un salarié ayant plus de 28 ans d’ancienneté, un passif disciplinaire vierge et, surtout, l’employeur qui n’établissait pas qu’il avait sensibilisé son salarié aux risques encourus dans le cadre de son obligation de sécurité (Cass. soc., 29 mai 2024, n° 22-18.328).

C’est-à-dire tout l’inverse de l’arrêt commenté.

Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique en droit du travail.

Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

Droit du travail – Droit de la sécurité sociale

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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

florent labrugere avocat droit du travail lyon

Maître Florent Labrugère

Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !