CA GRENOBLE, 02 décembre 2024, RG n° 23/02762 *
Par cet arrêt, la Cour d’appel de GRENOBLE est amenée à s’interroger sur l’existence d’un accident du travail survenu dans le cadre de l’exercice du mandat d’un salarié protégé.
Classiquement, selon l’article L. 411-1 du code du travail, un accident du travail est reconnu en présence d’un évènement brutal et soudain ayant entrainé une lésion d’ordre physique ou psychologique à un salarié.
Très vite, la jurisprudence a posé une présomption d’imputabilité : tout accident survenu au temps et au lieu du travail est présumé d’origine professionnelle.
En la matière, la jurisprudence a déjà admis l’existence d’un accident du travail pour un salarié protégé survenu au cours d’une mission rémunérée par l’employeur comme temps de travail et exécutée dans l’intérêt de l’entreprise.
Plus précisément, au cas d’espèce, il avait été victime d’un accident en regagnant son domicile après avoir pris part, au siège social de la société, à une réunion du comité central d’entreprise dont il était membre élu (Cass. soc., 11 octobre 1990, n° 88-19.392).
En revanche, tel n’est pas le cas d’un le salarié délégué syndical qui a été victime d’un accident de la circulation après avoir assisté à un colloque dans le cadre de son détachement syndical (Cass. civ. 2ème, 18 septembre 2014, n° 13-14.435).
Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.
Au cas d’espèce, il était question d’une salariée qui a eu des douleurs au genou gauche après avoir raté la marche du quai d’un tram en sortant d’une formation pour le CSE.
Après déclaration de l’employeur, et sans enquête, la CPAM a pris en charge l’accident du travail.
Ultérieurement, l’employeur a saisi les juridictions de sécurité sociale afin d’obtenir l’inopposabilité de ladite décision.
Dans un premier temps, la Cour d’appel de GRENOBLE note que la déclaration d’accident du travail mentionne comme lésion des douleurs au genou gauche et le certificat médical initial a constaté une contusion du genou gauche, en indiquant une date d’accident au 26 novembre 2019.
Elle met ainsi en évidence la concordance existante entre la lésion mentionnée dans les deux documents précités.
Elle souligne également que la nature de la lésion était compatible avec un report d’une consultation médicale au surlendemain des faits en cas de persistance des douleurs ou d’une impotence.
Par ailleurs, elle relève que l’accident est survenu au cours d’un déplacement pour l’employeur, à savoir une formation « mandat DP » pour le « CSE », donc au titre d’un mandat de délégué du personnel en lien avec le CSE de l’entreprise.
En outre, selon la Cour, si l’absence de réserves de l’employeur ne vaut pas acceptation de l’existence d’un accident du travail, il n’en reste pas moins que, dans les faits de l’espèce, la caisse n’était pas réglementairement obligée de procéder à une enquête administrative ou à l’envoi de questionnaires en l’absence de réserves de l’employeur et de tout élément, au sein de la date et du certificat médical initial, de nature à générer un doute sur les circonstances et l’origine professionnelle de l’accident.
Elle confirme donc l’existence d’un accident du travail et rejette la demande d’inopposabilité de l’employeur.
La décision vient donc mettre en lumière l’application de la présomption d’imputabilité pour un accident survenu au cours de l’exercice d’un mandat et durant un temps rémunéré comme du temps de travail effectif.
Pour rappel, selon l’article L. 2315-10 du code du travail, le temps passé en délégation est de plein droit considéré comme temps de travail et payé à l’échéance normale.
En cas de doute quant à la matérialité de l’accident, il est alors préconisé à l’employeur de rédiger des réserves motivées afin d’enclencher une instruction de la CPAM.
A défaut, comme dans l’arrêt commenté, il lui sera difficile de remettre en cause, par manque d’élément de preuve, la décision de prise en charge de la CPAM.
Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique en droit du travail et droit de la sécurité sociale.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
Droit du travail – Droit de la sécurité sociale
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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.
Maître Florent Labrugère
Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !