Un salarié peut-il refuser de réaliser des heures supplémentaires ?

Sauf salariés soumis à une convention de forfait, la durée du travail des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine selon l’article L. 3121-27 du code du travail.

Aussi, toute heure réalisée au-dessus de ce seuil est considéré comme une heure supplémentaire conformément à l’article suivant.

Se pose la question si un salarié peut refuser de réaliser des heures supplémentaires exigées par son employeur ?

Tout d’abord, au titre de son pouvoir de direction, il est généralement admis que seul l’employeur peut décider de recourir à la réalisation d’heures supplémentaires.

Ainsi, les heures supplémentaires imposées par l’employeur, dans la limite du contingent dont il dispose légalement et en raison des nécessités de l’entreprise, n’entraînent pas modification du contrat de travail (Cass. soc., 09 mars 1999, n° 96-43.718).

Autrement dit, une première réponse peut être apportée à la question posée : le salarié ne peut donc pas refuser de réaliser des heures supplémentaires exigées par son employeur.

A défaut, il commet une faute susceptible de donner lieu à une sanction disciplinaire, voire un licenciement.

A titre d’illustration, est justifié le licenciement pour faute grave d’un salarié qui a refusé d’accomplir des heures supplémentaires demandées par son employeur.

Les juges ont notamment relevé que ce refus était fautif dans la mesure où la réalisation de telles heures avait été demandée à titre exceptionnel, dans la limite du contingent annuel d’heures supplémentaires et ceci, afin d’effectuer un travail urgent. Ce refus, sans motif légitime, avait donc perturbé le bon fonctionnement de l’entreprise (Cass. soc., 26 novembre 2003, n° 01-43.140).

En revanche, la lecture a contrario de cet arrêt permet d’apporter une seconde réponse à la question posée : un salarié pourrait s’opposer à la réalisation d’heures supplémentaires s’il dispose d’un motif légitime.

Tel est le cas, par exemple, lorsque l’employeur a lui-même commis des manquements.

A titre d’illustration, une information tardive du salarié de la nécessité d’effectuer des heures supplémentaires peut justifier exceptionnellement un refus du salarié, de sorte que le licenciement fondé sur ledit refus n’est pas fondé (Cass. soc., 20 mai 1997, n° 94-43.653).

Par ailleurs, le recours systématique aux heures supplémentaires modifie le contrat de travail du salarié, de sorte que l’employeur ne peut valablement augmenter la durée hebdomadaire de travail du salarié qu’avec son accord exprès. Le refus de cette modification n’est pas fautif (Cass. soc., 08 septembre 2021, n° 19-16.908).

A titre d’illustration, une salariée a pu légitimement refuser de travailler les samedis dès lors que le caractère systématique des heures supplémentaires imposées le samedi avait pour effet de modifier de façon substantielle son contrat de travail (Cass. soc., 16 mai 1991, n° 89-44.485).

En conclusion, la question précitée amène à une réponse formulée avec un principe et une exception : un salarié ne peut pas refuser d’accomplir des heures supplémentaires exigées par son employeur, sauf motif légitime.

On rajoutera également à cette réponse qu’il n’existe pas « de droit acquis à l’exécution d’heures supplémentaires sauf engagement de l’employeur vis à vis du salarié à lui en assurer l’exécution d’un certain nombre » (Cass. soc., 10 octobre 2012, n° 11-10.455).

De plus, même si la réalisation d’heures supplémentaires relève de l’initiative de l’employeur, la jurisprudence a, toutefois, tempéré cette règle en estimant que le salarié peut prétendre au paiement des heures supplémentaires accomplies (Cass. soc., 14 novembre 2018, n° 17-16.959) :

  • soit avec l’accord au moins implicite de l’employeur,
  • soit s’il est établi que la réalisation de telles heures a été rendue nécessaire par les tâches qui lui ont été confiées.

Le Cabinet reste à disposition pour accompagner et assister salarié et employeur concernant une problématique en lien avec les heures supplémentaires.

Florent LABRUGERE

Avocat en droit du travail et en droit de la sécurité sociale

N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d’information. En raison de l’évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.

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Maître Florent Labrugère

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