CA PAU, 05 octobre 2023, RG n° 21/02231 *
Par cet arrêt, la Cour d’appel de PAU revient sur les conditions de prise en charge des pathologies figurant dans les tableaux de maladies professionnelles, dont celles visées par le tableau n° 57 A relatif aux troubles musculosquelettiques (TMS) susceptibles de toucher les membres supérieurs.
En la matière, on rappellera que le législateur a établi différents tableaux listant certaines maladies fréquemment présentées par les salariés et favorisées par leur travail. Ainsi, conformément à l’article L. 461-1 du code de la sécurité sociale, est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau.
A cet effet, le tableau n° 57 A vise notamment la « Tendinopathie aiguë non rompue non calcifiante avec ou sans enthésopathie de la coiffe des rotateurs ».
Généralement, les tendinopathies sont des maladies douloureuses des tendons, ces structures fibreuses qui relient les muscles aux os, notamment au niveau des épaules.
Aussi, de telles pathologies peuvent apparaitre des suites des conditions de travail, notamment pour les postes comportant une sursollicitation des membres supérieurs.
Dans cette optique, le tableau n° 57 A exige que la tendinopathie soit non rompue non calcifiant, critères d’ordre médical.
Le caractère calcifiant est important en la matière puisqu’en présence d’une tendinopathie calcifiante, celle-ci n’a pas d’origine professionnelle.
Telle était la problématique de l’arrêt commenté.
Le 14 octobre 2019, une salariée a déposé auprès de la CPAM une demande de reconnaissance d’une maladie professionnelle faisant état d’une tendinopathie aiguë de l’épaule droite. Après instruction, la CPAM a décidé de prendre en charge cette pathologie.
Au cas d’espèce, l’employeur soutient que la CPAM ne démontre pas le respect de l’ensemble des critères médicaux de la maladie déclarée par la salariée et, plus particulièrement, le caractère non rompu et non calcifiant de la tendinopathie aiguë relevant du tableau n° 57 A.
Sur ce point, la Cour d’appel de PAU rappelle que la maladie telle qu’elle est désignée dans les tableaux de maladies professionnelles est celle définie par les éléments de description et les critères d’appréciation fixés par chacun des tableaux. La maladie déclarée doit correspondre précisément à celle décrite au tableau, avec tous ses éléments constitutifs.
Les indications figurant sur le certificat médical doivent correspondre au libellé de la maladie, sans pour autant que soit exigée une correspondance littérale, dans la mesure où il appartient au juge de vérifier si la pathologie déclarée est au nombre des pathologies désignées par le tableau.
Or, elle relève que ni le certificat médical initial, ni la décision de la caisse, ni le libellé complet du syndrome renseigné par le médecin conseil sur la fiche de colloque administratif ne comportent d’indication quant aux caractères non rompu non calcifiant de la maladie.
De plus, la CPAM ne justifie pas que le code syndrome « 057AAM96A » correspond à la tendinopathie aiguë non rompue non calcifiante de la coiffe des rotateurs. Aucun élément du dossier ne permet de déterminer sur quoi se serait basé le médecin conseil pour retenir les caractères non rompu non calcifiant de la tendinopathie.
Dès lors, la Cour d’appel en conclut qu’il n’est pas établi que la maladie prise en charge correspond à celle désignée au tableau n° 57 A, de sorte qu’elle déclare inopposable à l’employeur la décision de prise en charge.
Cette décision peut être rapprochée de la position tenue pour des pathologies lombaires relevant du tableau n° 98.
Aussi, la Cour de cassation a rappelé la nécessité d’objectiver cette pathologie conformément aux exigences du tableau n° 98, notamment par rapport à l’existence d’une atteinte radiculaire de topographie concordante (Cass. civ. 2ème, 9 juillet 2020, n° 19-13.851).
Au cas présent, l’inopposabilité permet à l’employeur de pouvoir solliciter le retrait de son compte employeur de la maladie concernée et, le cas échéant, une réduction non-négligeable sur les cotisations sociales payées.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
Droit du travail – Droit de la sécurité sociale
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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.