Conseil de Prud'hommes
Pour tout litige concernant le droit du travail, la juridiction de droit commun est le Conseil de prud’hommes.
Celui-ci dispose d’une compétence extrêmement large concernant toute difficulté susceptible de se poser au cours de la relation contractuelle entre un employeur et un salarié (1).
Lors d’une instance prud’homale, plusieurs types d’actions peuvent se concevoir selon les circonstances d’une affaire (2).
1. Sur la compétence du CPH
a/ Conformément à l’article L. 1411-1 du code du travail, le conseil de prud’hommes juge tous les différends qui peuvent s’élever à l’occasion de tout contrat de travail entre les employeurs, ou leurs représentants, et les salariés qu’ils emploient.
Aussi, celui-ci peut être saisi tant pour trancher la question de l’existence d’un contrat de travail (Cass. soc., 7 décembre 2005, n° 04-46.625) que sur le bien-fondé d’un licenciement. Les domaines d’interventions de cette juridiction sont donc extrêmement vastes.
En revanche, son domaine d’intervention est strictement limité aux relations entre les salariés de droit privé et les employeurs privés, y compris les associations (Cass. soc., 30 septembre 2004, n° 02-43.655), de sorte que toute relation d’un fonctionnaire avec l’Etat relève de la compétence des juridictions administratives.
Tel est le cas, par exemple, d’une personne travaillant pour le compte d’un établissement public de santé gérant un service public à caractère administratif (Cass. soc., 15 juin 2016, n° 15-15.343).
Par ailleurs, la compétence d’attribution de la juridiction prud’homale s’arrête aux litiges d’ordre individuel, autrement dit, généralement entre un employeur et un salarié.
Tout litige portant sur les relations collectives, comme la contestation des élections professionnelles, relève de la compétence du Tribunal judiciaire.
b/ D’un point de vue territorial, le Conseil de prud’hommes normalement compétent est :
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- Soit celui dans le ressort duquel est situé l’établissement où est accompli le travail
- Soit, lorsque le travail est accompli à domicile ou en dehors de toute entreprise ou établissement, celui dans le ressort duquel est situé le domicile du salarié.
Le salarié peut également saisir les conseils de prud’hommes du lieu où l’engagement a été contracté ou celui du lieu où l’employeur est établi.
En application des règles classiques en procédure civile, lorsqu’il y a plusieurs défendeurs, le salarié saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l’un d’eux (Cass. soc., 16 février 2011, n° 10-16.423).
En la matière, toute clause attributive de juridiction est réputée non-écrite selon l’article R. 1412-4 du code du travail.
2. Sur les différentes formations
a/ La formation de droit commun du Conseil de prud’hommes concerne la saisine au fond. En la matière, tout Conseil de prud’hommes est saisi par une requête qui contient un exposé sommaire des motifs de la demande et mentionne chacun des chefs de celle-ci selon l’article R. 1452-2 du code du travail.
Le Greffe de la juridiction prud’homale convoque, ensuite, les parties à une première audience devant le bureau de conciliation et d’orientation qui est chargé de concilier les parties en vertu de l’article L. 1454-1 du code du travail.
En l’absence de conciliation, les parties sont renvoyées à une seconde audience devant le bureau de jugement une fois que l’affaire est en état d’être plaidée.
Avant même cette audience finale, il est possible pour le bureau de conciliation et d’orientation de prendre des mesures dites provisoires et conservatoires détaillées à l’article R. 1454-14 du code du travail.
Des demandes dès le stade du BCO peuvent être déterminantes pour la suite de la procédure, notamment en vue d’obtenir la communication de documents dont le salarié n’a pas en sa possession.
Tel peut être le cas par exemple de feuilles d’émargement attestant de la réalité des horaires d’un salarié (Cass. soc., 13 février 2008, n° 06-43.928).
En revanche, l’employeur ne saurait réclamer le remboursement de somme à un salarié au stade du BCO (Cass. soc., 6 mai 1997, n° 94-43.085).
Dans la mesure où il s’agit de mesure provisoire, les décisions du BCO ne peuvent faire l’objet d’aucun appel avant la décision finale prise par le bureau de jugement du Conseil de prud’hommes conformément à l’article R. 1454-16 du code du travail.
La jurisprudence a néanmoins prévu à cette impossibilité de recours une exception en cas d’excès de pouvoir commis par le BCO, un appel-nullité est alors possible (Cass. soc., 25 octobre 2011, n° 10-24.397).
La notion d’excès de pouvoir est strictement limitée. Dans une décision extrêmement exhaustive sur ce point, la Cour d’appel d’AMIENS a rappelé les deux hypothèses jusqu’à présent dégagées par la jurisprudence (CA AMIENS, 18 novembre 2020, RG n° 19/07605) :
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- D’une part, commet un excès de pouvoir le juge qui use de prérogatives que la loi ne confère à aucun juge.
- D’autre part. il y a excès de pouvoir en cas d’atteinte au principe de la séparation des pouvoirs c’est-à-dire lorsque le juge viole la Constitution du 4 octobre 1958 en empiétant sur les domaines du législateur ou du pouvoir exécutif.
En revanche, le non-respect du contradictoire ou l’absence de motivation d’un refus de faire droit à une communication de pièces ne saurait constituer un excès de pouvoir (Cass. soc., 11 septembre 2019, n° 17-25.300 ; Cass. soc., 18 mars 2015, 14-10.593).
Dans certains cas, la procédure est directement portée devant le bureau de Jugement comme dans l’hypothèse d’une entreprise en liquidation, d’une action en requalification d’un CDD ou d’une convention de stage.
b/ Il existe également une procédure d’exception pour obtenir le plus rapidement une décision, la formation de référé.
Celle-ci n’a vocation à servir que dans certaines situations, le juge du référé étant considéré comme le juge de l’évidence.
Aussi, l’article R. 1455-5 du code du travail énonce que dans tous les cas d’urgence, la formation de référé peut ordonner toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.
Il peut s’agir, par exemple, de l’accord d’une provision dans le cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, autrement dit, il n’existe aucun doute quant au bien-fondé de la demande formulée par le salarié (Cass. soc., 17 mai 2023, n° 21-24.392).
L’article suivant précise que la formation de référé peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent pour prévenir un dommage imminent ou pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le référé peut également être utilisé afin d’obtenir la communication de documents détenus par l’employeur, notamment sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile qui dispose que s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
Plus particulièrement, en droit du travail, la chambre sociale de la Cour de cassation a donné des précisions dans la marche à suivre pour les juges du fond en vue d’examiner une telle demande. Ainsi, il leur appartient de vérifier si les mesures demandées étaient nécessaires à l’exercice du droit à la preuve de la partie qui les sollicitait et ne portaient pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie personnelle des salariés concernés (Cass. soc., 16 novembre 2016, n° 15-17.163).
Ainsi, dès lors qu’un salarié justifie d’un motif légitime à obtenir la communication de documents nécessaires à la protection de ses droits, dont seul l’employeur disposait et qu’il refusait de communiquer, et sans qu’une atteinte excessive et disproportionnée à la vie privée d’autres personnes ne soit avérée, le juge peut ordonner, sous astreinte, la communication desdits documents à l’encontre de l’employeur (Cass. soc., 19 décembre 2012, n° 10-20.526).
c/ Enfin, au regard du principe du double degré de juridiction, il est tout à fait possible d’interjeter un appel à l’encontre d’une décision du Conseil de prud’hommes, prise sur le fond ou en sa formation de référé.
En la matière, l’appel doit être formé dans un délai d’un mois à compter de la réception de la décision à contester, délai réduit à quinze jours en référé.
L’appel est exclu contre des décisions dont l’enjeu financier du litige est inférieur à 5.000,00 €. Dans cette hypothèse, seul un pourvoi en cassation est possible.
Le Cabinet peut accompagner ou défendre, autant les salariés que les employeurs, dans le cadre de toute procédure initiée devant les juridictions prud’homales, tant en première instance qu’en appel.
Florent LABRUGERE
Avocat en droit du travail et en droit de la sécurité sociale
N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d’information. En raison de l’évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.