CA PARIS, 06 novembre 2024, RG n° 22/03570 *
Par cet arrêt, la Cour d’appel de PARIS apprécie le bien-fondé d’une rupture de période d’essai pendant la période de crise sanitaire liée à la Covid-19.
En premier lieu, on rappellera la finalité d’une période d’essai énoncée à l’article L. 1221-20 du code du travail.
Du côté employeur, elle permet d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience.
Le régime juridique de la rupture d’une période d’essai est assez souple.
En effet, sauf abus, l’employeur peut rompre l’essai sans être tenu de justifier d’un motif. En revanche, en cas d’abus, le salarié est alors en droit de réclamer l’indemnisation de son préjudice.
Tel est le cas, par exemple, pour une rupture liée à un motif non inhérent à la personne de la salariée mais en raison de difficultés économiques (Cass. soc., 15 décembre 2010, n° 09-42.273).
Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté et, plus précisément : le confinement peut-il justifier à lui seul une rupture de période d’essai ?
Au cas d’espèce, il était question d’une salariée qui a été engagée en qualité de magasinière à compter du 20 janvier 2020, son contrat de travail prévoyant une période d’essai de deux mois. La période d’essai a fait l’objet d’un renouvellement, par accord du 16 mars 2020, jusqu’au 15 mai 2020.
Le 17 mars 2020, en raison de la crise sanitaire, un confinement a été instauré et la salariée a dû cesser provisoirement d’exercer ses fonctions.
A sa reprise d’activité, le 11 mai suivant, l’employeur a mis fin à la période d’essai, rupture que la salariée a contesté devant les juridictions prud’homales.
En premier lieu, la Cour d’appel de PARIS indique que même si l’interruption n’a pas à être motivée, les circonstances de la rupture peuvent révéler une attitude fautive de l’employeur, la rupture pour un motif non inhérent à la personne du salarié étant considérée comme abusive.
Au cas présent, la salariée soutient qu’elle a été confinée et n’a plus travaillé avant le 11 mai, date de la lettre de rupture. Elle indique que n’ayant pas travaillé depuis le renouvellement de sa période d’essai, son employeur n’a pu apprécier ses compétences professionnelles.
Or, la Cour constate qu’aucun reproche ou remarque n’a été adressé à la salariée relativement à ses compétences sur la première période d’essai et que la salariée n’a pas travaillé pendant la durée de son renouvellement.
La salariée soutenant que la rupture de la période d’essai n’est pas liée à ses compétences professionnelles, il appartient à l’employeur de démontrer que la rupture est due à un motif inhérent à la personne de la salariée, ce qu’il ne fait pas en l’espèce.
La Cour juge donc la rupture de la période d’essai comme étant abusive. Elle alloue à la salariée une la somme de 4000 euros en réparation de son préjudice.
Aussi, pour répondre à la question posée plus haut, la crise sanitaire liée à la Covid-19 n’était pas un motif légitime pour rompre une période d’essai.
Au contraire, une telle rupture durant cette période peut caractériser un abus comme dans le cas d’espèce commenté.
Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique en droit du travail.
Maître Florent LABRUGERE
Avocat au Barreau de LYON
Droit du travail – Droit de la sécurité sociale
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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.
Maître Florent Labrugère
Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !