L’émission de réserves motivées dans les délais

CA PARIS, 07 mars 2025, RG n° 22/08720 *

Par cet arrêt, la Cour d’appel de PARIS est amenée à juger de la recevabilité de réserves motivées émises par un employeur suite à un accident du travail.

Depuis le 01er décembre 2019, l’article R. 441-6 du code de la sécurité sociale fixe un délai de 10 jours francs à compter de la déclaration d’accident du travail pour que l’employeur puisse émettre des réserves motivées auprès de la CPAM.

Ce texte précise que lesdites réserves sont émises par tout moyen conférant date certaine à leur réception.

En pratique, il est maintenant possible de les émettre en ligne sur le site net-entreprise.

Il est également possible de les adresser par courrier, de préférence, en recommandé pour apporter la preuve de leur envoi et leur réception en cas de contentieux.

En présence de réserves motivées, la CPAM a alors l’obligation de diligenter une instruction pour confirmer ou non la réalité de l’accident déclaré conformément à l’article R. 441-7 du code précité.

A défaut, le principe du contradictoire n’est pas respecté, de sorte que l’employeur est en droit d’obtenir l’inopposabilité de la décision de prise en charge (Cass. civ. 2ème, 25 avril 2024, n° 22-12.239).

Se pose la question en pratique de la recevabilité de réserves envoyées, par courrier recommandé, pendant le délai de 10 jours francs mais réceptionné, par la CPAM, au-delà dudit délai.

Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.

Au cas d’espèce, il était question d’un salarié qui a indiqué à son employeur avoir été victime d’un accident du travail le 26 mars 2021. Le 29 mars 2021, l’employeur a déclaré cet accident auprès de la CPAM.

Le 07 avril 2021, il lui a adressé des réserves motivées sur la réalité de l’accident, réceptionnées par l’organisme le 12 avril suivant. Dans le même temps, la CPAM a pris en charge, sans instruction, ledit accident.

Contestant cette décision, l’employeur a saisi les juridictions de sécurité sociale.

Après avoir rappelé les textes précités, la Cour d’appel de PARIS juge que si la date de réception doit être certaine, le délai de 10 jours court du lendemain de la déclaration à la date d’émission des réserves, soit le jour où le courrier est adressé.

Autrement dit, elle juge qu’il faut retenir la date d’émission et non de réception pour savoir si les réserves ont été émises dans le délai de 10 jours.

Pour la Cour, retenir la date de réception des réserves par la caisse aboutirait nécessairement à un délai inférieur à 10 jours pour l’employeur.

Au cas d’espèce, elle relève que le 29 mars 2021, la société a effectué la déclaration d’accident du travail, déclaration ne mentionnant aucune réserve.

Le 07 avril 2021, elle a adressé à la caisse, par courrier recommandé, son courrier de réserves qui a été reçu le 12 suivant.

Ainsi, le délai de 10 jours a commencé à courir le 30 mars, lendemain de la déclaration, pour expirer le 8 avril à minuit.

Dès lors, les réserves, établies le 7 avril 2021, étaient donc bien émises dans le délai de 10 jours même si elles ont été reçues hors de ce délai, pour des raisons non imputables à l’employeur

La CPAM avait dès lors l’obligation de diligenter une enquête.

Par conséquence, la Cour d’appel de PARIS juge donc que la décision de prise en charge doit être déclarée inopposable à l’employeur.

Cet arrêt vient mettre en lumière que dès lors que les réserves sont émises dans le délai de 10 jours francs fixé par l’article R. 441-6 précité, celles-ci sont recevables, peu important qu’elles ne soient reçues que postérieurement par l’organisme de sécurité sociale.

Cela implique, en pratique, que la CPAM doit attendre plusieurs jours à compter de l’expiration du délai de 10 jours francs pour prendre d’emblée une décision de prise en charge.

Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique en droit du travail et droit de la sécurité sociale.

Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

Droit du travail – Droit de la sécurité sociale

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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

florent labrugere avocat droit du travail lyon

Maître Florent Labrugère

Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !