L’inaptitude fondée sur des motifs médicaux et non des raisons personnelles

En quoi consiste l’inaptitude en droit du travail ? Telle est la question qui peut souvent se rencontrer ces dernières années.

L’inaptitude se manifeste généralement par la nécessité d’un changement de poste au regard de l’état de santé d’un salarié qui ne lui permet plus d’occuper son poste actuel et en l’absence de mesure d’aménagement, d’adaptation ou de transformation dudit poste selon l’article L. 4624-4 du code du travail.

Comme l’énonce le site du Ministère du travail, l’inaptitude est prononcée « lorsque l’état de santé (physique ou mentale) du salarié est devenu incompatible avec le poste qu’il occupe »

Autrement dit, l’inaptitude doit être fondée sur des raisons médicales et non pour des raisons personnelles propres au salarié.

Dans ce cadre, lorsqu’une inaptitude est prononcée par le médecin du travail, l’employeur a la possibilité de contester celle-ci devant le Conseil de prud’hommes selon une procédure spécifique.

Inversement, le salarié a également la possibilité de contester un avis rendu par le médecin du travail qui aurait refusé de le déclarer inapte.

Dans ces deux hypothèses, le différend sera avant tout d’ordre médical susceptible de donner lieu à une expertise. La juridiction prud’homale devra vérifier s’il existe des raisons médicales de justifier ou non l’inaptitude

Tel a été le cas pour la Cour d’appel d’ORLEANS dans un arrêt en date du 29 novembre 2023 (RG n° 23/00660).

Au cas d’espèce, un employeur a contesté un avis d’inaptitude rendu pour l’une de ses salariés. Pour ce faire, il mettait en avant qu’elle aurait instrumentalisé les services de santé au travail pour obtenir un avis d’inaptitude fondé non pas pour des raisons médicales mais seulement des raisons de convenance personnelle.

Dans sa motivation, la Cour d’appel va reprendre la chronologie du dossier.

Le 22 mars 2021, la salariée s’est vue refuser une demande de mobilité qu’elle avait sollicité en raison d’un déménagement.

Le lendemain, son arrêt de travail a débuté et a été prolongé à plusieurs reprises jusqu’au 03 janvier 2023. Les arrêts ont été justifiés pour des troubles anxiodépressifs.

Cependant, pour la Cour, même s’il peut être convenu que le placement en arrêt maladie le lendemain du refus de la mutation peut être attribué à une coïncidence due au seul hasard, elle estime que l’utilisation que la salariée a fait de son état de santé est de pure convenance.

Elle juge que l’inaptitude n’est pas fondée sur des raisons médicales en s’appuyant sur les éléments suivants :

  • Le 28 octobre 2022, lors d’un pot organisé pour le départ d’une collègue, la salariée s’est déclarée disposée à mettre fin à son arrêt maladie si son employeur acceptait de la muter,
  • Elle a souhaité mettre fin à son contrat de travail par le biais d’une rupture conventionnelle pour se consacrer à d’autres projets professionnels
  • Sur un réseau social, la salariée s’est présentée comme étant à la recherche d’un emploi.

Elle relève également que la salariée n’a jamais consulté de spécialiste, hormis son médecin traitant, pas plus que d’un traitement ou d’un suivi particulier susceptible de justifier l’inaptitude.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, elle annule donc l’avis d’inaptitude et juge la salariée apte à son poste de travail.

Au regard de la décision finale rendue par la Cour d’appel d’ORLEANS, nous pouvons en tirer les conséquences pratiques suivantes :

  • Côté salarié : en cas d’inaptitude, il est indispensable de réunir les éléments médicaux afin de justifier celle-ci, notamment en cas de pathologie psychique : Prescription d’un traitement, consultation d’un spécialiste…

  • Côté employeur : en cas de doute quant au bien-fondé médical d’une inaptitude, la contestation de l’avis rendu par le médecin du travail peut être envisagée.

    Cette hypothèse fait généralement suite à un refus d’une demande d’un salarié (rupture conventionnelle, mutation…) peu de temps avant le début des arrêts de travail ayant conduit à l’inaptitude.

L’accompagnement et les Conseils d’un Avocat en la matière peuvent être primordiaux pour adopter la meilleure stratégie et ce, avant même le prononcé de l’inaptitude.

Compte tenu de sa double approche droit du travail/droit de la sécurité sociale, le Cabinet peut accompagner, salarié et employeur, pour toute problématique touchant à l’inaptitude qui peut d’ailleurs être d’origine professionnelle en lien avec un accident du travail ou une maladie professionnelle.

Florent LABRUGERE

Avocat en droit du travail et en droit de la sécurité sociale

N.B : Cet article est mis en ligne uniquement à des fins d’information. En raison de l’évolution permanente de la législation et la jurisprudence, le Cabinet ne peut toutefois pas garantir son application actuelle et vous invite à l’interroger pour toute question juridique ou problème concernant le thème évoqué.

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Maître Florent Labrugère

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