L’interdiction totale de travailler lors d’un arrêt de travail

CA ORLEANS, 02 juillet 2024, RG n° 23/01834 *

Par cet arrêt, la Cour d’appel d’ORLEANS est amenée à rappeler les obligations pesant sur tout assuré en arrêt de travail.

Au préalable, on rappellera que selon l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, l’assurance maladie assure le versement d’indemnités journalières à l’assuré qui se trouve dans l’incapacité physique constatée par le médecin de continuer ou de reprendre le travail.

A cet égard, l’article L. 323-6 du même code liste toute une série d’obligations pesant sur l’assuré en arrêt de travail.

Plus particulièrement, il doit s’abstenir de toute activité non autorisée.

Sur ce point, l’arrêt de la Cour d’appel d’ORLEANS est parfaitement limpide et rappelle toute la jurisprudence pertinente.

Ainsi, l’assuré ne peut exercer pendant l’arrêt de travail aucune activité qui n’a pas été autorisée de quelque nature qu’elle soit :

  • activité rémunérée,
  • bénévole,
  • domestique,
  • sportive,
  • ludique

et ce, même pendant les heures de sortie autorisées, sans qu’il soit nécessaire d’établir la volonté de fraude de l’assuré.

Autrement dit, pendant son arrêt de travail, l’assuré doit cesser tout travail quelconque, y compris une activité de gérant ou l’accomplissement de tâches administratives liées à son activité professionnelle, peu important leur caractère limité.

La seule exception concerne l’autorisation expresse et préalable du médecin prescripteur de l’arrêt de l’exercice d’une activité durant l’arrêt selon l’article R. 323-11-1 du code précité.

Encore récemment, la Cour de cassation a rappelé l’interprétation stricte de cette exception (Cass. civ. 2ème, 27 juin 2024, n° 22-17.468).

Le respect de cette obligation est crucial, à défaut de quoi, l’assuré doit restituer l’intégralité des indemnités journalières perçues depuis la date du manquement, les juges n’ayant aucun pouvoir pour réduire le montant réclamé par la CPAM (Cass. civ. 2ème, 20 juin 2019, n° 18-19.006).

Telle était la problématique qui était soulevée dans l’arrêt commenté.

Au cas d’espèce, il était question d’un assuré qui a été en arrêt au titre d’un accident du travail sur la période du 01er septembre 2020 au 31 octobre 2021.

Tout au long de ces arrêts, il a perçu des indemnités journalières de la part de la CPAM pour un montant total de 24.196,66 €.

Ultérieurement, celle-ci lui a demandé le remboursement de l’intégralité desdites indemnités au motif qu’il aurait exercé une activité au cours de son arrêt. Contestant cet indu, l’assuré a saisi les juridictions de sécurité sociale.

Au cas d’espèce, la Cour d’appel d’ORLEANS relève que l’assuré a procédé, le 15 juin 2021, à une déclaration d’auto-entrepreneur auprès de la Chambre de Commerce et d’Industrie au titre d’une activité de vente de matériel de pêche.

Il ressort en outre des publications postées par l’assuré sur les réseaux sociaux en octobre 2021, que celui-ci propose par exemple à la vente des « cordes Catfish heart » de 15 m de long et d’un diamètre de 6 mm, ainsi que des casquettes et des tee-shirts.

Pour la Cour, ce dernier a donc exercé une activité non autorisée et quitté le département à de multiples reprises sans autorisation de la caisse et sans motif médical, alors qu’il était en arrêt de travail.

L’assuré ne saurait prétendre s’être contenté de vendre sur le marché de l’occasion des objets personnels alors que la caisse justifie de la création d’une activité d’auto-entrepreneur pendant la période d’arrêt de travail.

Or, il n’avait pas d’autorisation médicale préalable pour exercer une activité professionnelle sur la période soumise au contrôle, peu important qu’il soit autorisé à sortir sans restriction d’horaire, ces autorisations de sortie se limitant en tout état de cause au département.

La Cour d’appel le condamne donc à la restitution des indemnités journalières versées, soit un montant total de 24.196,66 €.

Cet arrêt met en lumière l’impérieuse nécessité de respecter l’obligation de ne pas travailler durant un arrêt, sauf autorisation expresse et préalable, sous peine d’être soumis à des sanctions financières drastiques.

Au surplus, aujourd’hui avec la présence en ligne, il peut être simple pour la CPAM de rapporter la preuve de l’exercice d’une activité comme en témoigne l’arrêt commenté avec les réseaux sociaux.

Pourrait également se poser la question de savoir si des ventes régulières réalisées sur internet, type le bon coin ou Vinted, ou la gestion d’un Airbnb pourraient être assimilées à une activité prohibée pour un salarié en arrêt.

Au regard de la jurisprudence en la matière, la réponse pourrait être oui, notamment si les revenus dégagés sont imposables.

Le Cabinet reste à disposition des entreprises et salariés en vue de traiter toute problématique concernant un arrêt de travail.

Maître Florent LABRUGERE

Avocat au Barreau de LYON

Droit du travail – Droit de la sécurité sociale

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N.B : On ne sait pas, au jour de la rédaction de ce billet, si l’arrêt est définitif et n’a pas fait l’objet d’un pourvoi en cassation.

florent labrugere avocat droit du travail lyon

Maître Florent Labrugère

Avocat en droit du Travail et de la Sécurité Sociale à Lyon. Anticipez le prochain mouvement !